Zola 2010/201 1" Les disparues"

  • 1. Septembre 2010 La rentrée.


    Une nouvelle saison commence, et après des vacances bien méritées, vous avez repris le chemin de ce bon vieux Zola. Quel plaisir de retrouver cette chouette petite salle de quartier avec son personnel et ses bénévoles qui deviennent pour vous au fil des séances, comme des amis discrets que l'on a plaisir à retrouver. Et cette rentrée ne manque pas de panache avec des films tels qu'Un Poison violent, Copacabana, Twilight episode 3, Shrek 4, L'Arbre, Tamara Drewe, Le Premier qui l'a dit et Toy Story 3. Sans compter que vous tenez entre vos mains, "L'Emile" cette revue classieuse que bien des magnats de la presse nous envie. Vous vous dites que l'année va être pépère et vous n'êtes pas loin de vous assoupir, alors laisser moi d'abord vous parler de cette inquiétante histoire de disparitions.
    Dés mon adhésion à l'association de bénévoles j'ai entendu parler de cette sombre affaire. Mais alors, il ne s'agissait que de bribes de phrases, volées de ci de là lors de conversations impromptues. Des rumeurs à peine dévoilées. Des mines de conspirateurs et des rires gênés. A mes questions précises, il ne m'était fait que de vagues réponses me laissant insatisfait. Évidement, lorsque l'on rejoint, comme je venais de le faire, un groupe solidement structuré, il y a toujours de ces petites incompréhensions, souvent source de conflits et d'incompréhensions. J'essayais donc de faire mon boulot d’adhérent le mieux possible (Veiller à ce que Michel, Laurent et Olivier aient leurs verres toujours remplis)en ignorant ces étranges rumeurs. Jusqu'à Mercredi dernier au Zénith, le sympathique petit bar PMU du coin, où Michel le président de l'association des bénévoles avait organisé un de ces raout dont il a le secret. « Tu comprends, m'avait-il expliqué un jour, ce genre de petite fête permet de resserrer les liens dans le groupe. » Un vrai meneur d'homme ce type ! La soirée battait son plein, quand j'ai décidé d'engager la conversation avec cette jolie petite blonde potelée qui semblait, malgré une méchante coquetterie dans l’œil, me dévisager depuis un bon moment. Nous papotions avec entrain lorsqu'elle me dit son attachement au bénévolat, « Une vraie Mère Térésa » me dit-elle en riant. J'attaquai donc avec toute la finesse qui me caractérise, en lui demandant si elle pousserait ce sens de l'abnégation jusqu'à me raccompagner chez moi. Contrairement à vous, femmes cruelles, elle ne me jeta pas son verre en pleine gueule, mais me sourit gentiment. Elle m'avoua qu'elle avait un peu trop bu et qu'elle s’appelait Pauline, ce qui évidemment n'était pas antinomique. Comme j'allais pousser mon avantage par le compliment qui tue, elle ajouta en riant : « Si vous voulez me séduire, ne tardez pas trop, puisque je vais avoir cinquante ans la semaine prochaine. » Devant mon air ahuri, elle ajouta dans un charmant petit gloussement : « Vous n'êtes pas au courant ? » Avant de poursuivre, elle eut un regard inquiet pour la salle. Comme beaucoup de gens nous regardaient, elle se pencha complice, vers mon oreille : « Depuis quelques années, à chaque début de saison, il manque une ou deux femmes dans l'association. Personne ne vous en a parlé ? Exclusivement des femmes de plus de cinquante ans. » A ce stade de la soirée, je me dis que la sangria de Michel était à l'évidence un peu trop dosée, comme d'habitude, et que ma chance légendaire m'avait une nouvelle fois permis de tomber sur la foldingue du groupe. Mais je n'allais pas m'en formaliser, puisqu'elle me permettait d'entendre à mon oreille, le doux gazouillis de sa voix, même si je n'accordais aucun crédit à ses propos. Et si vous voulez tout savoir, j'étais prêt à tout entendre pour pouvoir finir dans les bras de ma blonde, qui continuait de jeter des regards anxieux autour d'elle. Au bout d'un moment, sa paranoïa me servit bien, puisqu'elle passa son bras sous le mien en me demandant de la raccompagner chez elle. «Trop de gens me regardent, allons-y. » Tout heureux de ma bonne fortune, je ramenai la belle chez elle pour une nuit de délices dont je ne peux vous parler, puisque Sandrine, la directrice du Zola qui lit sur mon épaule, intervient : «  Tu ne vas pas écrire de cochonneries, j'espère ? Je compte sur toi ! On attend la subvention de la mairie, alors vas-y mollo !» Ne pouvant rien refuser à Sandrine, j'obtempérai sans discuter, mais c'est bien dommage, puisque l'Emile aurait gagné pas mal de lecteurs avec cette belle nuit d'amour. Ah Pauline !
    Vous n'allez pas le croire, mais, alors qu'allait visiblement s'ouvrir pour moi avec cette douce fée une ère de lait et de miel, ma belle a purement et simplement disparu. Oui, madame, disparue, volatilisée, envolée, partie. Reconnaissez que je ne suis pas veinard quand même ! Pour une fois que l'amour me souriait !
    Évidemment, je pourrais vous faire encore d'autre révélations croustillantes, mais le film (Et quel film, hein !) va commencer, alors rendez-vous dans l'Emile du mois prochain pour la suite de cette "palpitante" aventure.
    A suivre donc...
  • 2. Octobre 2010
    (Résumé de l'épisode précédent : Une bénévole a disparu ! )

    Salut fidèle lecteur...Et jolie lectrice ! Oh, je ne me fait pas d'illusions pour ce qui est de votre fidélité, mais je connais bien le Zola : Pour que le film démarre à l'heure, hein ! Alors pourquoi ne pas feuilleter l'Emile ce merveilleux petit journal qu'Olivier s'échine à faire paraitre en noir et blanc, alors qu'il serait si beau en couleurs (Le journal, hein, pas Olivier !).
    Le mois dernier, non vous n'avez pas pu oublier, j'ai réussi à rencontrer et perdre l'amour de ma vie, et tout cela au Zola et en un seul paragraphe ! Cela tient de l'exploit, non, ? Depuis, je n'ai pas chômé. J'ai tout fait pour retrouver ma petite Pauline. Parce qu'il n'était pas possible qu'après notre si belle nuit d'amour, ma blonde s'évanouisse de la sorte. Oui, une bien belle nuit d'amour, ne ricanez pas, les filles dans le fond...
    Alors, j'ai commencé à interroger les gens autour de moi. Autour du Zola et de l'association de bénévoles en fait. La rumeur parlait pour Pauline, d'un éventuel départ en Amérique Latine, Mexique ou Argentine, alors j'ai rejoint Monette et Margharita deux beautés déjà bien entamées à coup de mojitos, malgré l'heure matinale. Accoudées au comptoir en compagnie d'Ana, une autre « gamine » de l'association, elles ont éclaté de rire à ma question : «  Pauline au Chiapas, tu plaisantes ? Et pourquoi pas Michel et Laurent à l'eau claire ? ». Ensuite, quand j'ai parlé de cette histoire de disparitions, elles ont levé les yeux au ciel : « Cette pauvre Pauline est bien gentille, mais je ne sais d'où elle tient une telle fable. Elle saoule tout le monde avec cela depuis trop longtemps » Comme j'expliquai qu'il était quand même étrange qu'elle s'évapore ainsi, dés notre première nuit d'amour, elles ont de nouveau bien ricané en m'expliquant le nombre de fois où elles s'étaient barrées en courant après une première rencontre. « Surtout après avoir trop bu ! » Je parlai alors de ce problème avec Sandrine et Laurent les directeurs. Ils me semblèrent gêné et seule Sandrine, voulue bien admettre qu'à chaque nouvelle rentrée, il fallait compter quelques défections dans les rangs de l'association. « Mais rien que de très normal, dans une telle situation » « Il faut compter presque cent personnes dans ce groupe. Ça va ça vient. C'est la vie » Ajouta un Laurent bien fataliste. Quand je demandai si je pouvais consulter les archives, je compris que je les faisait carrément chier et ils m'invitèrent à voir cela avec Michel le Président de l'association. Je trouvai le dit Michel confortablement installé à son « bureau » dans le fond du bar PMU « Le Zénith ». Il ne s'embarrassa pas de formules de précautions : « Oui, des femmes quittent l'association chaque années, oui il s'agit toujours de femmes âgées, oui elles partent sans rien dire, mais... »Conclut-il brutalement, « c'étaient toutes des chieuses, et personne ne les a jamais regretté ! » Je lui demandai une liste de ces disparues, mais il haussa les épaules en me congédiant : « Tu crois que l'on n'a que ça à foutre ? »
    Je ne me laissai pas décourager, et après avoir interrogé en vain les voisins de Pauline et ses collègues de travail, je me rendit au commissariat de Villeurbanne afin d'y rencontrer un responsable. A la vérité je ne dépassai pas la guérite du planton qui m'expliqua que si un inspecteur devait se déranger chaque fois qu'une femme quittait un homme ! Comme j'insistais, lui faisant part de mon inquiétude il daigna enregistrer ma déclaration sur la main courante. J'aurais voulu consulté les archives de ces mains courantes afin de connaître le nombre exacte de disparues répertoriées, mais là encore on m'envoya bouler. De retour au Zénith, devant mon air abattu, Michel m'offrit un verre. Puis il m'expliqua que je n'aurais qu'à profiter du festival du film court en Novembre, pour voir un maximum de membres de l'association. « Elles te confirmeront que toutes ces interrogations ne sont que chimère.
    Pour une fois que ce cher Président est de bon conseil, nous attendrons donc ce formidable festival pour continuer cette haletante histoire si vous le voulez bien.
    Tout cela pour vous dire que je n'ai pas eu le temps de visionner un seul de ces formidables films que vous pourrez voir en Octobre : Dossier 51, Du silence et des ombres, Double take, Hors-la-loi, Amore, Simon Werner a disparu, Cuchillo de palo, un homme qui crie, mais j'ai un très beau souvenir de F...Comme Fairbanks
  • A suivre donc...
    3. Novembre 2010 Festival du film court.
    (Résumé des épisodes précédents : Des bénévoles disparaissent, et tout le monde s'en fout ! )
    Comme me l'avait conseillé Michel dans le dernier épisode ( Encore très présent dans vos mémoires, n'en doutons pas !), je décidai de profiter du festival du film court pour rencontrer quelques bénévoles. Pas au cinéma, je vous rassure. Qui voudrait voir des petits films en noir et blanc, sous-titrés et venus de pays inconnus ? Vous ? Quoi vous ? N'essayez-pas de vous la jouer intello « Arte-Télérama » Tout le monde sait très bien que vous ne venez au Zola que dans l'espoir de rencontrer l’âme sœur, comme tout le monde d'ailleurs. Bon, là n'est pas le problème, vous faites bien ce que vous voulez après tout, mais sachez que je ne mis pas les pieds dans le cinéma, je fis tous mes entretiens, au bar PMU du coin, Le Zénith. Et je les fis bien, puisque les langues ne tardèrent pas à se délier. J'appris tout d'abord qu'il n'était pas toujours facile de gérer cette centaine de personnes aux caractères bien trempés, et qu'un homme avait une importance primordiale dans ce petit microcosme : Michel. Tout le monde s'accordait à trouver au président mille qualités et autant de défauts. Marie-Jo et Monette, « les historiques » par exemple étaient plutôt amères. Elles lui reprochaient des promesses sans lendemain. « Des promesses ? » Comme je n'étais pas certain de bien comprendre, elles me mirent les points sur les I : « Ben, qu'est-ce que tu crois ? Il nous a parlé mariage, ce salopard. Pour ce faire élire à la présidence, rien d'autre. Et pas qu'à nous, à ce qu'il parait » Les « Latinos » elles aussi avaient pas mal de griefs. Irène, Margarita et Ana par exemple, avaient les yeux flamboyants quand elles évoquaient certains agissements de ce diable d'homme. Agathe et Olivier, La « jeune garde », espéraient bien prendre rapidement la place de cet encombrant personnage. Même les directeurs, Sandrine, Laurent avouaient sans se faire trop prier que le bougre commençait à leur peser un peu. Mais tous s'accordaient à reconnaître les talents de gestionnaires du bonhomme. « Depuis qu'il a pris les choses en mains, les comptes sont sortis du rouge. Je ne sais comment il s'y est pris, cela tient du miracle » m'expliqua Laurent approuvé par Alain l'ancien directeur. En rentrant chez moi ce soir là, j'avais mal au crane. (Et tout cela sans voir un seul film, encore un exploit, non ?) J'avais entendu beaucoup de mots caractérisants ce fameux Michel : « magicien, miracle, surhomme, et autre Casanova ou Don Juan », mais je n'avais pas avancé d'un pouce pour ce qui était de ces foutues disparitions. Pourtant plusieurs personnes avaient daigné admettre que, oui, peut-être, en y réfléchissant bien, elles avaient été surprises par l'absence de certaines, mais qu'après tout, elles étaient majeures et vaccinées et que ce n'était pas le genre de la maison de se mêler de la vie des autres. Pour le festival, Michel avait comme chaque années préparé un ragout géant, et nous nous sommes régalé en engloutissant des hectolitres de bières. Et c'est là qu'Alain l'ancien directeur du Zola, déjà bien ému, s'est approché de moi pour glisser un papier dans ma poche en me soufflant de son haleine avinée un « chut » tellement discret qu'il fut entendu jusqu'à Fourvière. Une fois chez moi je dépliai le petit document sur lequel je pus lire le nom de quatorze femmes. Femmes disparues, je n'en doutais pas, à moins qu'Alain dans son ivresse, ne m'ait confié son carnet de bal par erreur.
    Nous voilà donc avec pas mal d'émotions, alors quand je vous aurai préciser que l'on a jamais revu Alain depuis ce soir là, je pense qu'il sera temps pour vous chers lecteurs de regarder ce formidable film qui va débuter en attendant le prochain numéro de cette revue décidément bien palpitante.
    A suivre donc...
    4. Décembre 2010
    (Résumé des épisodes précédents : Des bénévoles disparaissent, et tout le monde s'en fout ! )
    Depuis le mois dernier, munie de la liste de nom que m'a fourni ce pauvre Alain, j'ai fouillé à droite à gauche pour mieux cerner toute cette affaire de disparues : Que des femmes de 54 à 89 ans. La première, Martina Jolon en 2005, la dernière Simone Joubert, fin septembre. Aucuns cadavres, pas de corps, pas de nouvelles, rien. Un vrai mystère. Quinze si vous compter ma petite Pauline. J’exclus Alain de ce sinistre décompte, bien que son absence commence à sérieusement m’inquiéter. « Tu te fais trop de soucis » me glisse un Michel rieur lors de la petite fête qu'il a organisé pour Noël. C'est dingue comme ce type aime cuisiner ! Nous avons droit quasiment chaque mois à un nouveau copieux repas. Toujours des viandes en sauce. « Plus facile à préparer et moins chers » m'explique le bougre. Alain avant de disparaître m'avait expliqué que c'était grâce à ces repas de masse qu'ils avaient équilibré les comptes. « On vend des assiettes pour toutes les grandes occasions, tu verras son Chili con carne pour le festival Ibérique : Tout Lyon se déplace pour le déguster. » Comme j'avais demandé s'il avait besoin d'aide, on m'avait expliqué que Michel se « démerdait seul ». Pour tout ce qui était de la restauration, Michel ne travaillant qu'avec une petite équipe resserrée autour de lui. « Que des femmes, des voisines à lui, parait-il. Des femmes bien mystérieuses,n’appartenant même pas à l'association. Tu les connaitras pour la fiesta qui conclut le festival Ibérique » Et comme je trouvais tout cela bien étrange, il y eut des sourires gênés. « On s'est habitué, depuis le temps ! »
    Je me disais que j'avais bien fait d'adhérer à cette association. Je ne voyais pas trop de films, c'est vrai, mais je ne m'ennuyais pas une seconde. A ma seconde visite au commissariat, je pus enfin rencontrer un jeune inspecteur qui daigna m’écouter. A la fin de mon petit laïus, il sourit comme les autres pour finir par me rassurer en me promettant de bien noter mes remarques.
    Une fois dehors, j'étais plus que jamais décidé à ne compter que sur moi même. J'étais mort d'inquiétude. Toutes ces femmes disparues avaient le même profil : plus de cinquante ans et sans famille, des proies idéales pour un assassin sans scrupules. Quand à Alain, je désespérais de ne jamais le revoir. Si sa disparition comme celle de ma petite Pauline était liée à nos dernières conversations au Zénith, cela signifiait que le ou les responsables de toute cette affaire se trouvait dans la salle du bistrot ces soirs là. J'essayais de dresser une liste, et cela faisait beaucoup de monde. Mais une chose était sûr : c'était quelqu'un du sérail , et cela n'était pas trop rassurant pour nous, fidèles du Zola, à quelques jours de 2011.
    Tiens, en parlant de 2011, si on continuait cette incroyable histoire l'année prochaine ? J'ai encore toute mes courses de Noël à faire, et puis je ne pense pas que l'enquête progresse beaucoup pendant les fêtes. Les gens du Zola sont des gens comme vous qu'est-ce que vous croyez ? Même s'ils hébergent des assassins dans leurs rangs. Ils attendent que le père Noël leur amène, toute une brassée de jolis cadeaux : qui des films comiques, qui des maillots de l'Olympique de Marseille, qui une couverture couleur pour son magazine, etc...
    Que ceux qui n'auront pas succombé à la dinde fourrée à la buche glacée nous retrouvent l'an prochain dans les pages de ce beau journal pour la suite de cette vénéneuse histoire.
  • A suivre donc...
    5. Janvier 2011
    (Résumé des épisodes précédents : Des bénévoles disparaissent, et tout le monde s'en fout ! )
    Déjà 2011 et vous êtes toujours là. Oh, pas tous, évidemment, vu la moyenne d'age des habitués du Zola, je sais bien que je perds des lecteurs à chaque numéro. Mais ceux qui restent, sont accrochés à mes paroles. Ce n'est pas tant que cette histoire vous passionne particulièrement, je le sais bien, mais comme je soudoie nos gentils projectionnistes pour qu'ils retardent chaque jour un peu plus le démarrage du film, vous n'avez pas d'autres alternatives que de continuer à lire ces pages. Et moi, je continue parce que je ne sais pas ou va nous mener cette triste histoire. (Et parce qu'Olivier le rédacteur de l'Emile me paye des bières) Fin 2010, j'ai commencé à regarder tous les gens qui travaillent au Zola, avec méfiance. Et il y avait de quoi : 14 femmes disparues, ce n'est pas rien. Et Alain, cette vieille petite chose volatilisée. Et ma Pauline ? Que se passait-il exactement Au Zola ? Une secte sataniste ? Un sérail killer sanguinaire ?
    Je ne pouvais faire confiance à personne, et ce n'était pas les flics qui allaient m'aider. Ni vous d'ailleurs, j'en suis bien conscient. Je me sens très seul. Depuis les confidences d'Alain, c'est le rôle de Michel qui m'intrigue. Il a vraiment beaucoup trop d'importance alors qu'il n'est finalement que le président d'une association de bénévoles. Et ce coté chef de bande avec ses voisines ne me semble pas très orthodoxe. Quand j'en parlai à Sandrine, une des seules en qui j'avais encore un peu confiance, elle haussa les épaules fataliste en me disant qu'elle aussi ne trouvait pas cela très normal, mais elle n'était pas à son poste depuis assez longtemps. « Cela rapporte énormément sans nous couter un seul centime. Il n'y a pas de raisons de changer » Lui avaient assuré Laurent et Alain, lorsqu'elle avait fait part de ses doutes. J'aimerais en parler avec Laurent, mais prétextant la préparation du festival Britannique, ce dernier m'éconduit, limite poli.
    Désespéré, je vais me réfugier au Zénith où je me perds en réflexions dans mon verre de bière, collé au comptoir.
    « Vous les avez retrouvé vos vioques ? » le patron du Zénith interrompit brutalement mes pensées. «  Qu'est-ce que vous racontez ? Vous ne pouvez pas être poli ? » Sans ce démonter, le patron remplit mon verre en riant : « Quoi ? Vous n'allez pas faire votre pucelle, c'était des clientes à moi, et ce n'étaient pas des perdreaux de l'année, faut bien le reconnaître. Mais laissez moi vous dire un truc : ces femmes, elles étaient toutes mal dans l'association. Ça ne m'étonne pas qu'elle se soit barrées. » Je sursautai : «  Vous pensez réellement qu'elles sont parties, tout simplement ? » « C't'affaire, évidement, quoi d'autre ? Faut vraiment être con pour croire le contraire. Sans vouloir vous vexer, hein ! » Je n'allais pas me vexer, pour une fois que quelqu'un voulait bien me parler. Je fis renouveler les consommations avant de questionner innocemment : « C'est vous qui organisez les buffets pour le Zola ? » Il sourit «  Non, nous avons un accord avec Michel le président. Il vient avec son équipe, ses voisines, parait-il, et j'aime mieux vous dire que cela ne rigole pas. Il... » « Hé ben, il quoi ? » Et comme le patron restait silencieux les yeux écarquillés, je me retournai pour voir Michel venir vers nous : « Alors, les filles, on papote ? » « Ouais, on parle foot » s'empressa de mentir le patron. Ce nouvel incident n'allait pas me rendre plus serein. Depuis déjà presque cinq mois je vous raconte sans rien vous cacher cette terrible histoire avec pour tous remerciements, regards noirs et quolibets des gens de l'association qui me promettent un accueil « musclé » pour la semaine du cinéma Britannique et Irlandais qui arrive en février. Je me sens en danger et j'espère vous voir nombreux à ce chouette festival, pour me protéger et partager une bière avec quelques stars britanniques invitées cette année, comme au hasard, Ken Loach, John Boorman, ou Kenneth Branagh.
    A suivre donc...
    6. Février 2011 Ciné O'clock.
    (Résumé des épisodes précédents : Des bénévoles disparaissent, et tout le monde s'en fout ! )

    La foule se presse au Zola en ce mois de Février, pour se régaler de tous ces films Britanniques pendant que toute l'équipe se démène afin que tout se passe pour le mieux. En vérité, ce sont plutôt les bénévoles qui s'activent pendant que les directeurs, Sandrine, Laurent et Michel dégustent des bières au Zénith. J'en profite donc pour tendre l'oreille et glaner quelques infos. Ils parlent du grand repas qui doit couronner ce merveilleux festival et Michel explique que cette année, il va faire un « Irish stew » ragout traditionnel Irlandais. Rien que de très banal, au demeurant, mais à l'arrivée d'Irène, les voilà qui se mettent à discuter du festival de Cannes. Quand Michel annonce que cette année, il compte bien s'y rendre, mon cerveau enfiévré élabore immédiatement un plan machiavélique (pas moins !) pour profiter de son absence : Je compte aller fouiller sa maison du sol au plafond. Depuis le début de cette affaire, je me dis que Michel ne peut être complètement étranger à tout cela. Puis le festival m'entraine dans son tourbillon et même si parfois l'idée que Pauline et Alain courent un grand danger m'effleure, j'évacue rapidement cette triste réalité pour profiter de ces grands moments de cinéma, puis je rentre à pied chez moi pour réfléchir encore et toujours à ces tristes disparitions. Et c'est là, sur le trottoir du cours Émile Zola que je reçois cet appel sur mon portable. Je suppose, que vous avez déjà reçu vous même un coup de téléphone dans la rue, et que vous savez à quel point il est difficile d'entendre son interlocuteur. Pareil pour moi. Vous me verriez, planté sur ce trottoir à beugler comme un sourd des allo, allo désespérés. Je vais raccrocher, convaincu d'être victime d'une erreur lorsqu'il me semble entendre, venue du fin fond de l'univers, une voix qui chevrote : « Écoute moi bien, c'est Alain ! » Je me fige instantanément : «  Putain, merde, Alain tu es où ? » Et là, alors que l'ancien directeur va certainement éclairer ma lanterne, la liaison se brouille inexplicablement. (Ce n'est pas aussi inexplicable que ça, hein, j'ai des contraintes, il faut bien que cette histoire tienne jusqu'en juillet !) Je n'entends plus qu'un seul mot sur deux : « Soit ----- prudent, il faut te----er ----Michel » et la communication est coupée. Je reste là, statique et empoté au milieu de l'avenue, bousculé par les passants pressés de rentrer chez eux. Je me jette dans le premier bar ouvert pour réfléchir devant une bière. Je suis ravi de savoir Alain vivant, même si, en cas de choix, j'aurais préféré entendre Pauline. Que m'a dit ce pauvre Alain ? Il m'a conseillé la prudence, ça j'en suis certain, mais ensuite, pour Michel, qu'avait il essayer de me faire comprendre ? De me confier, ou de me méfier de lui ? Justement comme j'arrivais vers le Zénith, Michel était là qui me faisait signe. Je le regardai longuement, hésitant à accepter son invitation. Ce mec m'impressionnait. Pourtant, comme il me semblait se trouver en de bonnes dispositions, j’osai lui reparler des disparitions. « Tu trouves cela normal, qu'Alain, par exemple ne donne plus signe de vie ? Justement maintenant, à la veille du festival Ibérique ? » Michel me jeta un regard amusé, tout en signifiant d'un geste précis au patron, l'ordre de remplir nos verres. La tête commençait à me tourner, mais je n'osai pas protester. « Alain, vois-tu, est quelqu'un qui a passé toute sa vie dans le cinéma, il vit et a toujours vécu dans les films et cela jour et nuit. Il ne peut pas supporter la triste réalité quotidienne, et là, j'imagine que s'ennuyant à la retraite, il s'est fait son petit scénario. Tu verras qu'un de ces quatre, tu vas recevoir un coup de fil mystérieux, du genre : « Attention, j'ai peur ! » et autres conneries du même tonneau. J'étais interloqué, je n'avais parlé de l'appel d'Alain, à personnes, et voilà que Michel en parlait comme si...Soudain je me souvins qu'il travaillait dans les télécommunications et je basculai instantanément dans une paranoïa des plus réussie. Je devais avoir la mine défaite, puisque Michel me tapa gentiment sur l'épaule. « Allez, rentre chez toi, tu as besoin de sommeil. Et puis elles finiront bien par revenir, toutes tes « disparues » » Il riait encore à gorge déployé quand je tournai le coin de la rue. Il faut bien se rendre à l'évidence : Je ne suis pas plus avancé après ce coup de fil, et il me faudra bien un mois minimum pour tenter de démêler les embrouillaminis de cette affaire. Sans compter que le mois prochain, c'est « Les reflets du cinéma Ibérique » et là, ça rigole plus, parce que, s'il il y a un festival auquel il faut participer au moins une fois dans sa vie, c'est bien celui là. Aussi, je compte sur vous. Sans parler de la fiesta qu'il ne faut rater sous aucun prétexte. Alors, rendez-vous en mars pour les reflets.
    A suivre donc...
    7. Mars 2011 Les reflets du cinéma Ibérique
    (Résumé des épisodes précédents : Des bénévoles disparaissent, et tout le monde s'en fout ! )
    Vivre le festival Ibérique « de l’intérieur », est une expérience qui compte dans la vie d'un homme. Cette année, outre des films, d'une belle tenue, on annonce une pléiade de prestigieux invités. Si Pénélope Cruz et Javier Bardem ont déjà donnés leur accord, Michel ne désespère pas d'accueillir Antonio Banderas et Paz de la Huerta, pour ce qui va être un évènement mondial. Sandrine le regarde incrédule, affolée par ses idées de grandeur, mais Michel balaye d'un revers de main ses objections : « Villeurbanne va devenir pendant quinze jours, le centre du monde, pas moins ! » Il a carrément pété les plombs, pépère. Il n'y a aucun doute là dessus. Comme je lui faisais remarquer un soir, au Zénith, que tout cela allait amener de gros problèmes d'organisation, il éclata de rire en disant qu'il ferait « un peu plus de chili con carne, et basta » Moi, comme convenu, j'essaye de poser des questions chaque fois qu'un ou une bénévole me tombe sous la main. Mais avec la foule qui essaye d'entrer à toutes les séances, je passe vite pour un gêneur encombrant. D'ailleurs, Laurent ne prend pas de gants pour me signifier que je dois arrêter de faire « chier tout le monde avec ces histoires à la con » Vulgaire, non ? Je vais répondre quand il me cloue littéralement en m'enfonçant son index dans le plexus : « Continue tes conneries et tu vas disparaître à ton tour » Je me retrouve vite fait, bien fait sur le trottoir sans savoir si sa menace était bien réelle. Troublé, je rentre chez moi, mort de trouille. Si je gêne tant que cela, cela veut-il dire que je m'approche de la vérité ? Devrais-je laisser tomber ma petite enquête ? Mais les disparues ? mais Alain ? Mais ma petite Pauline ? Non, je ne peux abandonner. je me sens investit d'une mission quasi-divine. Je dois continuer, quitte à y laisser ma vie. (Si avec de telles déclarations, je n'emballe pas un max !)
    Je reviens pour la fiesta. Un grand moment cette fiesta !
    La salle du centre culturel est bondée lorsque j'y fait mon entrée. L'orchestre latino me déchire les tympans, mais cela ne gêne apparemment personne puisque les danseurs se bousculent sur la piste. Ma curiosité me mène directement vers le bar où je découvre un Michel radieux, entouré de son « équipe spéciale » J’aperçois Quatre, cinq femmes, toutes plus belles les unes que les autres qui s'affairent sans rechigner. J'essaye de m'avancer vers la cuisine, quand Michel me barre le chemin de son bras tendu. « Holà, mon gars, on ne rentre pas ici ! » J'ai à peine eu le temps d’apercevoir deux marmites géantes bouillant sur des plaques électriques. « Goute moi plutôt ce chili, tu m'en dira des nouvelles » me dit le président en me mettant d'office une assiette fumante dans les mains. Et vous savez quoi ? Et ben, il est réellement extra ce chili con carne. Je n'ai jamais rien mangé de tel. Et, je ne suis pas le seul apparemment, à voir la foule qui se bouscule au bar. J'ai dit que j'aiderai pour la fermeture, car j'espère qu'avec l'effet de l'alcool combiné à la fatigue, j'obtiendrai plus de confidences. Malheureusement, peu au fait des habitudes des bénévoles, je me suis retrouvé à boire un peu trop. Et lorsque je suis rentré chez moi en titubant, j'ai vite fait le tour des maigres infos que j'avais pu recueillir dans la soirée. En vrac : « Alain a dû filer avec une belle gamine » ou bien « Tes disparues sont parties, parce qu'elles en avaient ras le bol du Zola » avec le pompon : «  Ta petite Pauline avait trop bu au cours de cette fameuse soirée, et, excuse moi de devoir te le dire crûment, mais tu n'étais vraiment pas son genre à cette femme. » Allez dormir sereinement, après une telle déclaration !
    J'ai un besoin urgent de rencontrer mon analyste, alors, donnons nous rendez-vous le mois prochain.
    A suivre, donc...
  • 8. Avril 2011
    (Résumé des épisodes précédents : Des bénévoles disparaissent, et tout le monde s'en fout ! )
    Après un mois de dépression causée par toutes les calomnies lancées à mon encontre par de viles jalouses, j'ai décidé d'aller fouiller dans la vie de Michel. J'avais prévu d'aller chez lui pendant qu'il se pavanerait sur les marches de Cannes, mais je ne peux plus attendre. Je suis trop à cran. Sans compter Olivier, le rédacteur de ce journal, qui ne cesse de me harceler. D'un autre coté, je dois bien avouer qu'Olivier est le seul à me soutenir dans cette histoire. « Fonce » me dit-il depuis le début. En novembre, lorsqu'Alain m'avait confié une liste de 14 noms de femmes disparues (mais si, souvenez-vous !), Olivier m'avait aidé dans mes recherches. Et là, il m'encourage à aller fouiller chez Michel pendant une réunion. « Tu ne risques rien, j'assiste au bureau avec lui. En principe, nous finissons la soirée au resto. Je te bip dés que Michel s'en va. ». Il est bien ce petit ! Pourtant je ne suis pas dupe : Il veut prendre la place de Michel, c'est tout. Comme vous, il se moque royalement de mes bénévoles disparues. Mais je suis tellement seul que je ne peux pas trop faire la fine bouche. Me voilà donc à foncer vers la zone résidentielle où Michel possède une petite villa. Des rumeurs malveillantes, m'avaient parlé de ce « château » ou vivait notre président, mais rien n'aurait pu me préparer au choc qui m'attendait ce soir là. La villa, grande comme deux fois le stade de France, était ceinte d'un parc qui renvoyait le parc de la Tête d'Or au simple rang de square de quartier. Franchir les grilles ne fut qu'un jeu d'enfant pour l'athlète musclé et félin que je suis, mais traverser le parc me parut interminable. Heureusement, le magnifique clair de lune qui nous inondait ce soir là, me permit d'admirer de ravissants massifs fleuris. Difficile d'imaginer Michel en jardinier, et pourtant... Un peu tendu, je n’arrêtais pas de vérifier mon portable. Une fois gravit le monumental perron grâce à un escalier de marbre, je me retrouvai un peu penaud. Je ne sais pas vous, mais moi, je ne suis pas coutumier de ce genre de situation. Je compris rapidement, en découvrant l’énorme serrure, toute l'étendue des difficultés qui m'attendaient. J'essayai bien de « farfouiller » un peu les différents verrous, mais sans grande conviction, je dois bien le reconnaître. Savez-vous, qu'il m'arrive, lorsque je rentre du Zénith, tard chez moi, d'avoir les pires difficultés à ouvrir ma propre porte ? J'en étais là à pester contre mon amateurisme lorsqu'un : « Vous voulez un coup de main » me fit faire un délicieux petit arrêt cardiaque. Je me retournai pour me trouver face à une femme ravissante qui me fixait durement de ces magnifiques yeux bleus, pailletés d'or. Je reconnu immédiatement, une des voisines de Michel, entraperçue l'autre soir à la fiesta du Festival Ibérique. « Qu'est-ce que vous foutez là ? »me lança-t-elle méchamment. J'étais en nage. Elle se tenait dans l'obscurité du porche, et je ne voyais pas ses mains, mais ne doutais pas une seconde qu'elle tenait une arme, et qu'elle n'hésiterait pas à s'en servir. Son regard de feu, parlait en ce sens . « Alors  ?» Voilà qu'elle s'impatientait ! Je m'étais fourré dans un beau merdier et je ne pus qu'avancer une bien pauvre explication à ma présence dans cette propriété : « Michel avait besoin d'un dossier pour le Zola, il m'a demandé de passer le récupérer. » Faussement décontracté je tentai un : « Il avait vraisemblablement oublié sa serrure, quelle tête en l'air, ce Michel » qui ne la détendit pas vraiment. Quand elle sortit son portable, mes genoux fléchirent. « Vous appelez la police ? » «  Non, j’appelle Michel, des objections ? » Je savais ma dernière heure arrivée, et mon ultime soucis, dans cet instant de grande solitude, c'était toi, lectrice chérie. Oui, toi qui ne connaitrai jamais le fin mot de cette triste histoire. Ma geôlière referma son portable, un premier sourire aux lèvres : « Michel dit que ce n'est pas grave. Il récupèrera ce dossier plus tard. Rentrez chez vous. » Je crus avoir mal compris, pourtant elle me raccompagna affable, jusqu'à la sortie. Mille pensées m’agitaient. Je ne comprenais pas pourquoi Michel n'avait rien dit, et je m'attendais à une délicate situation lors de notre prochaine rencontre. Avant de nous séparer la jeune femme me prit par le bras pour m'aider à sortir. ELLE PORTAIT AU POIGNET, LE PETIT BRACELET QUE J'AVAIS VU L'AUTRE NUIT AU BRAS DE PAULINE. Terrifié, je filai en courant, lorsqu'elle me cria : «  N'oubliez pas de changer de pantalon » Alors je baissais les yeux pour découvrir ma honte.
    Que ceux qui n'ont jamais eut une trouille pareille me jette le premier Émile. Il va bien me falloir un mois pour me remettre. Rendez-vous en mai. A suivre, donc



  • 9. Mai 2011
    (Résumé des épisodes précédents : Des bénévoles disparaissent, et tout le monde s'en fout ! )
    Le mois dernier, accablé par la honte que j'avais éprouvé en me faisant surprendre en pleine effraction, je m'étais bien juré de tout laisser tomber. Adieu Pauline, Alain et toutes les disparues, jamais nous ne vous retrouverons. Ce mystère qui m'obsède depuis si longtemps, restera donc irrésolu. J'ai tellement la trouille, que je reste terré chez moi pendant des jours. Rencontrer Michel, après ce qui c'est passé devant sa villa, m'est tout simplement inconcevable. Je passe mes journées à regarder la télé, fuyant toutes invitations, jusqu'à ce que ce bougre d'Olivier ne parvienne à me faire sortir de ma tanière : « Viens boire une paire de bière avec moi au Ninkasi, j'ai à te parler. » et comme je vais lui raccrocher au nez il ajoute : « Crois-moi, c'est important ! » Alors, je le rejoins. Peut être parce que je commence à en avoir ras le bol de la télé, mais plus surement parce que j'ai une putain d'envie de bière ! « Pascale a disparu ! » L'accueil d'Olivier me coupe les bras. « Pascale ? Tu plaisantes ? » Pascale est une bénévole « historique », que vous connaissez certainement. Mais si, voyons, son rire tonitruant pendant les films les plus poignants, personne ne peut l'oublier. Pascale disparue, c'est tout un pan de l'association qui disparaît. Je regarde Olivier incrédule, et j'ai une réaction puérile : « Pourquoi elle ? Elle n'a même pas cinquante ans ? » Olivier sourit : « Elle fait plus jeune, mais elle les a bien. Maintenant, tu ne peux plus reculer, tu dois profiter du festival de Cannes pour retourner chez Michel. Tu es le plus doué d'entre nous » Il ne manque pas d'air ce gamin. Sa basse flagornerie me laisse de marbre, pourtant je sais bien qu'il va me falloir retourner au casse pipe. Je dois le faire pour le Zola, pour l'Emile, pour l'association, pour vous, pour les bénévoles restantes, pour la France, pour la patrie... haut les cœurs et résonnez trompettes !!! (Un peu de patriotisme, ne peux pas vous faire de mal, bande de soixante-huitards.) Alors Olivier, pour m'initier à la technique du forçage de serrure, me présente « Paulo » un pote à lui qui sort d'un long séjour en prison. « Tu verras, c'est un artiste. Le plus fort dans son domaine. » Comme je vais rétorquer qu'un artiste doué, éviterait en priorité de passer la plus grande partie de sa vie en prison, le susnommé Paulo me broie les articulations en me serrant la main. Après de longues heures d’infructueux essais, Paulo convient que je suis un « vrai manche » « Il n'arriverai même pas à rentrer chez lui ! » (Ça, il me semble que je vous l'avais déjà avoué) Devant tant d'incompétence, Paulo propose de m'accompagner pour ouvrir les serrures de la maison de Michel. Olivier est enthousiasmé par cette idée à la con, et nous voilà donc, par une belle nuit étoilée, mon repris de justice et moi, tout occupé à violer la résidence du président de l'association. Non, je vous jure ! Je n'ai pas toute ma tête, moi parfois. Par précaution, je porte des couches cette fois là. Ce qui nous attend est trop énorme et ne peux se narrer, vite fait bien fait en bout de page. Alors profitez tranquillement de ce bon film qui va commencer, parce qu’après l'épisode du mois prochain, il n'est pas certain que vous ne remettiez jamais les pieds au Zola !
    A suivre, donc...
    10. Juin-Juillet 2011
    (Résumé des épisodes précédents : Des bénévoles disparaissent, et tout le monde s'en fout ! )
    La nuit est belle, mais je n'ai franchement pas le temps de l'admirer, non, vraiment pas. Accompagné de Paulo, l'ami d'Olivier je retourne fouiller la maison de Michel, le président de l'association, que je ne trouve vraiment pas blanc-bleu dans cette histoire de disparitions. Je n'ai plus de nouvelles d'Alain, non plus de ma chère Pauline, et pour couronner le tout, Pascale, « le rire sonore » du Zola, vient, elle aussi de disparaître. Si vous pensez que je ferais mieux d'aller au bar PMU « Le Zenith » afin de vous laisser tranquillement regarder votre film, vous avez foutrement raison et je ne suis pas loin de penser comme vous, mais Olivier, mais Pauline et toute ces disparues qui hantent mes nuits depuis bientôt un an. Mon devoir m'appelle ! Pour ne pas rencontrer l'irascible voisine de l'autre soir, nous contournons, cette fois, l'immense propriété de Michel. Franchir la grille est un jeu d'enfant, et nous nous retrouvons rapidement face à une petite porte à l'arrière de la maison. Paulo, qui prend son rôle très au sérieux, commence à sortir son matériel avec mille précautions. Quand il me déclare pompeux : »Mate un peu l'artiste », je baisse le loquet de la poignée par automatisme et évidemment la porte qui n'était pas fermée s'ouvre sous le regard furieux du petit repris de justice, qui pour masquer son irritation, se la joue « petit chef de gang »: « Toi, va voir les étages, je m'occupe du rez de chaussée » Il commence à sérieusement me courir sur le râble le petit malfrat. Malgré la grandeur de la baraque, il ne me faut que quelques minutes pour faire le tour des chambres. Mais qu'est-ce que j’espérais trouver, hein ? Par acquis de conscience je fouille en vain les tiroirs et les placards avant de redescendre au rez de chaussée retrouver mon complice. Il a disparu le monte en l'air et je vais l'appeler quand je vois une porte ouverte, sur un escalier. La cave sans aucun doute. J'allume ma frontale pour éviter de me prendre la gamelle du siècle. C'est frais et humide, et je me met à chuchoter des « Paulo, Paulo » un peu chevrotant. En bas je découvre en premier lieu, une petite pièce de terre battue où sont stocké des millier de grands crus. Mince, il ne s'emmerde pas le président. Plus loin ma tête heurte un objet qui fait tomber ma lampe. Je me baisse pour la chercher à tâtons quand je sens des gouttes qui me tombent sur la nuque. Putain, c'est humide ici ! Je refixe la lampe à mon front. J'éclaire mes mains pour découvrir qu'elles sont poisseuses de sang. Je vais prendre un malaise quand les néons s'éclairent soudain me permettant de découvrir une charmante scène bucolique : Paulo pendu par les pieds à un croc de boucher, se vide tranquillement de son sang, dans une rigole aménagée à cet effet. Il a la gorge ouverte d'une oreille à l'autre. Je suis en train de me dire que j'ai bien fait de mettre des couches quand Michel que je n'avais pas vu me demande d'une voix enjouée: Alors, tu apprécies mon « petit chez moi ? »D'un geste ample, il désigne toute cette partie de la cave carrelée de blanc avec son étal de boucher et ses quatre ou cinq congélateurs. Michel se lave les mains dans un grand évier en m'invitant à faire de même. « Allons là haut, je finirai plus tard, nous avons à discuter. » Je me dis que ma seule chance de m'en tirer, c'est Olivier. Oui, vous pensez, comme moi, hein ? : que je suis fichu ! Dans la cuisine Michel m'invite à m'assoir en sortant deux verres et une bouteille poussiéreuse. « C'est une petite poire que je fais moi même. Après tu gouteras mon génépi ». Je suis terrifié, j'ai mille questions à poser, mais je ne peux faire de phrases : « Tu, tu, tu, tu... » « Bois, tu parleras après. » Sans réfléchir je m'enfile la valeur d'un verre à vin de sa gnôle. La brulure me fait venir les larmes, alors il rit. Oui, il rit. Le boucher au mains souillées de sang rit, comme si tout cela n'était qu'une blague. Je vais me réveiller, c'est certain. L'alcool m'a donné du courage : « Mais Michel...Ne me dit pas... » « Quoi ? Évidemment que j'ai tué Paulo, je n'aime pas les fouille-merde ! » Il me remplit mon verre avant de se lever pour prendre une nouvelle bouteille : « Du génépi, cueillit avec amour, dans la montagne » «  Mais, Michel, on ne peut pas... » Il rugit : «  Mais si, on peut. La preuve ! Commençons par le début, j'ai un BEP de boucherie et des frangins chasseurs. Alors, c'est moi qui depuis toujours m'occupe de la viande. Quand je suis devenu président de l'association, la première bénévole c'était un accident. Je te le jure, elle a glissé dans l'escalier. Alors, comme on approchait de la fiesta Ibérique et que l'on avait besoin de fric, j'ai eut l'idée du chili con carne. J'ai l'estomac qui se révulse, et comme il comprend ma question muette, il hoche la tête : « Oui, cette année aussi. Il était bon, non .? » Je serre les dents pendant qu'il me serre un génépi de gala. «  J'adore travailler la viande. Alors, comme il y avait quelques bénévoles qui me gonflaient particulièrement et que l'on ne peut compter chaque année sur une bonne canicule, j'ai trouvé ce moyen de nous faire un peu de fric, et d’alléger l'association. Comme elles n'avaient pas de famille, il n'y avait aucuns problèmes. » « Mais, Pauline ? » Il me regarde gentiment : « Ouais, Pauline, c'est ma seule erreur. Mais, elle buvait trop, elle parlait trop et commençait à avoir des soupçons. Comment m'imaginer qu'un type comme toi allait se mettre à fouiller partout ? »Un long silence s'installe, bref hommage à ma petite fée avant que je reprenne : « Et Alain ? Et Pascale ? » Il éclate de rire : «  Tu n'es pas au courant ? Ces deux là cachent leur amour sur une ile en Méditerranée, tu me prends pour un monstre ? » « Tu vas me tuer, moi aussi ? Mais Olivier est au courant, tu es foutu. » « Pas sur. Toi je t'aime bien, si tu me promets de ne rien dire, tu auras la vie sauve. Mais il faudra me rendre un service tout d'abord » Hébété par tout ce que je viens d'apprendre (et par l'alcool) je reste coi. « Arrange toi pour faire venir ici Olivier, cette nuit » J'ai pesé le pour et le contre pendant quelques secondes, mais qu'est-ce que vous auriez fait à ma place ? Olivier fera un bon plat du jour pour la rentrée prochaine, qui s'annonce décidément, festive et ...gastronomique.