samedi 2 juin 2007

N°02 La nuit du grand amour

- Je viens d’assassiner ma femme.
Le nez dans ma bière, je ne vais pas me laisser impressionner pour si peu. A cette heure de la nuit, rien ne peut me surprendre. D’ailleurs, ils sont nombreux dans ce bar, ceux qui rêvent de se débarrasser de leurs femmes. L’alcool donne de drôles d’idées tout de même. Depuis des années, moi j’en cherche une de femme, et tous ces types qui jouent les victimes ou les blasés m’énervent au plus haut point. Mon voisin comme les autres. Je sais bien qu’il plaisante et j’adore cela en général, mais pas sur les femmes, non, ce sujet pour moi est sacré...et douloureux. Je jette un regard furtif à l’assassin avant de lancer.
- Vous voilà veuf mon pauvre vieux.
Si j’ai cru le faire rire c’est raté, mais après tout je m’en tape qu’il apprécie ou non mon humour, le sien est limite. Je le détaille mieux, il est banal, mais ses vêtements soignés et coûteux dénotent un peu dans ce bar. Il a peut-être réellement tué sa femme après tout. Je hausse les épaules avant de replonger dans ma bière. De toute façon, j’ai parlé pour tuer le temps. Tuer le temps est mon occupation principale. Je vis entre parenthèse, en attente, en partance pour la rencontre inévitable avec le grand amour. Ce grand amour qui m’arrachera à ma vie de solitude et de médiocrité. La femme de ma vie est là, quelque part dans Lyon, elle existe j’en suis sur. Je sais qu’un soir comme celui là, elle poussera la porte du bar et nous nous reconnaîtrons. Oh ! N’allez pas croire que c'est une habituée de ce genre d’endroits, non, pas du tout. Mes rêves sont plus ambitieux, plus... classe.
Un soir elle va sortir avec quelques amis, et après le spectacle ou le restaurant quelqu’un aura envi de boire un dernier verre dans un bar à musique. Evidemment mon amour refusera car ce genre d’endroit lui déplaît. Mais devant l’insistance de ses amis elle finira par céder. Les cheveux mouillés et les yeux mi-clos elle apparaîtra enfin devant moi. Elle aura un bref mouvement de recul à cause du bruit ou de la fumée, mais ses amis la pousseront gentiment à l’intérieur. Ils iront s’asseoir dans l’obscurité d’un box lointain, mais il sera trop tard : Nos yeux se seront croisés et tout sera dit. Comme moi elle aura compris que le destin vient de frapper et que l’amour va nous transporter sur des rivages lointains et mystérieux.
- Je vous offre un verre ?
Perdu dans mes rêves je sursaute.
- Je ne bois jamais avec des assassins.
Qu’est-ce qu’il croit l’autre, j’ai des principes moi. Ma Maman a sut m’éduquer comme il le faut.
Il est loin tout à coup mon voisin. Loin très loin parce qu’elle est là, sur le seuil du bar, celle que j’espère depuis si longtemps. Mon rêve enfin exaucé, la femme idéale, la femme de ma vie. Elle balaye le bar d’un regard rapide et enfin me voit.
Nous nous comprenons et elle s’avance vers moi. Comme je l’ai toujours su, elle est renversante. Je descends de mon tabouret pour l’accueillir lorsque mon voisin se retourne et sourit :
- Ah ! chérie, enfin, je commençais à me faire du souci.
Et elle se jette dans ses bras sans vergogne. Vous pouvez croire ça ?
Comment croire encore à quelque chose de nos jours si l’on ne peut se fier à ce qu’il y a de plus sacré : L’amour.
Vous auriez réagi comme moi, je n’en doute pas. Grâce à un tesson de bouteille acéré, le faux tueur est devenu un vrai cadavre en moins d’une seconde. Sa femme me fixe avec stupeur, mais dans ses prunelles écarquillées je devine de l’admiration, et je suis sur qu’elle m’attendra.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je suis pas douée en orthographe mais je pense qu'on écrit pas "sut" mais "su" quand c'est j'ai su, tu as su, il a su...
Me trompe-je ?
A part ça, j'avais dit que j'avais pas le temps ce soir, mais j'y suis encore sur ton blog, Loulou !
Une juste ex-crsf....

Eloïse a dit…

oui, à ce moment-là, l'hystérique de l'orthographe que je suis notera aussi que l'on écrit "je suis sûr" et non "je suis sur".. mais c'est pas la dictée de Pivot ici :)

Eloïse.