dimanche 6 mars 2016

14. La saga Guerin.

Jean Christophe n'est toujours pas revenu de congés et j'en suis contrarié. Joël doit nous téléphoner dès qu'ils auront contacté les descendants de Guerin. Nous avons pu avoir quelques précisions à leur sujet : Le patriarche, Jean Paul Guérin est mort en 2001, laissant son négoce de vin à sa femme Marguerite. Michel, le fils travaille et vit lui aussi sur le domaine avec sa femme et ses gosses. La fille, Alice s'est suicidé en 62. Un chagrin d'amour d'après les rumeurs. Nous avons essayé vainement de joindre les survivants par téléphone. La gendarmerie de Nyons a bien voulu nous éclairer sur ce qu'ils appellent « la saga Guerin » :

  • Ils ont commencé à s'installer en 60,61. Bien avant l'arrivée des pieds noirs en tout cas. Le père seul restait sur ses terres en Algérie. Ses deux enfants le rejoignaient pour les vacances. Ils ont racheté un domaine en friche, avec un sacré coup de pouce des autorités, susurrent les jaloux. Et ils sont nombreux par ici. En quelques années, le vieux a remonté toutes les vignes, modernisant les chais, plantant de nouveaux cépages et rachetant petit à petit les domaines voisins. Augmentant ainsi les inimitiés régionales.
Réellement une belle histoire. Je songe à ces gens qui ont vécus au milieu de chaos historiques. Ont-ils été bourreaux ou victimes ? En attendant, voir d'autres témoins de cette époque venir mourir vingt ans plus tard dans leur jardin a dû être un sacré choc. A moins qu'ils ne soient partie prenante dans ces meurtres. Une hypothèse pas plus ridicule qu'une autre. Un sacré manque d'élégance, pour le moins.


  • Mais, Joël, ce n'est pas possible. Ils ne peuvent pas refuser de te recevoir.
  • Si, la preuve.
Nous avons nos amis au téléphone, et les nouvelles ne sont pas bonnes. A Nyons, pas moyen de rencontrer un membre de la famille Guerin.
  • Ils ont de bonnes raisons : Mère trop âgée, travail dans la vigne, salon du vin et autres excuses bétons.
  • Et les gendarmes ? Et Julot ? Avec sa cave, il doit avoir des rapports privilégiés avec cette famille.
  • Hé bien non, justement. Tiens toi bien, il n'aime pas leur vin et n'en a jamais acheté ni vendu.
Je reste con.
  • Ce n'est pas possible. Qu'est-ce qu'il a leur vin ?
Joël ne répond pas à ma question :
  • Mais nous avons trouvé quelque chose.
  • Miracle ! Parle vite, ange de lumière.
Joël soupire fortement dans le combiné, et je sais qu'il doit lever les yeux au ciel tout en pointant son index sur son front afin d'indiquer à Paulo mon haut degré de folie. Il m'apprend que les deux cadavres ont été retrouvé sur des terrains appartenant aux Guerins. Ce dont nous nous doutions un peu, soit dit en passant, sans vouloir trop jouer les cadors.
  • Bon, maintenant la thèse de la vengeance est indiscutable.
Michel fait la moue. Il est toujours partisan du sérail-killer.
  • Réfléchit un peu, triple buse, nos deux morts appartenaient au même commando. Ils étaient tous les deux, contrairement aux autres appelés, favorable à cette action de protection d'un domaine en Algérie et on retrouve leurs corps sur des terres appartenant aujourd'hui aux héritiers de ce même domaine. Si cela ne pue pas la vengeance, je me demande ce qu'il te faut. Passe moi la liste, je vais te trouver le coupable. Quand je m'emballe ainsi, Michel sait me calmer :
  • Un petit verre de blanc nous fera le plus grand bien...surtout à toi !
« Ce qu'ils ont comme vacances, ces putains de libéraux » me confie Michel en fonçant dans les rues de la Croix Rousse, Le Basque n'étant toujours pas rentré de congé nous rallions le bar de ce bon vieux Roger. « Les vraies valeurs, les vraies valeurs » me dit Michel décidément bien en verve. Mais aujourd'hui, il sera dit que nous n'irons pas au bar. Ce qui ne va pas améliorer l'humeur de mon pote. C'est Lucien qui d'abord m'appelle pour me dire que Raymond Prieur, le type du commando qui vit au Brésil, a pût être contacté, et coup de bol, il doit venir passer quelques jours de vacances à Lyon dans les jours qui viennent.
  • Vous savez quand, exactement ? Vous avez pris rendez-vous ? Je réalise en parlant, que deux questions d'affilées, c'est un peu trop pour Lucien, qui effectivement bafouille :
  • Ouais, il arrive Mercredi. Ciao.
  • Merde, Lucien, vous avez pris rendez-vous ?
  • Dis-donc, pourquoi tu me vouvoies ?
Je reste scié par sa question.
  • Mais qu'est-ce que tu racontes ? Je ne te vouvoie pas, Arobase n'est pas avec toi ?
  • Ah, ben non, il fait un dépannage informatique chez Marcelle. Tu sais bien, la grande rousse drôlement bien foutue. Et il rit.
  • Épargne moi les détails. Tu l'as ton rendez-vous ?
Il se rengorge pour me dire que « Évidemment, qu'est-ce que tu crois. » Il va raccrocher quand il se souvient d'un détail : « Ah, avec tout ce boulot, j'allais oublier : Le vieux Rochette que vous avez rencontré l'autre jour, vous avait parlé d'un ami, un gars de leur régiment. Un nommé...Il doit fouillé ses papiers alors je le coupe :
  • Berthot. Rencontrez-le, cela peut-être important. J'entends Lucien maugréer. Son allusion à « tout ce boulot » sentait déjà la demande d'augmentation alors je tranche dans le vif : Tu iras moins au bistrot. Cela ne peut te faire de mal.
Il me raccroche au nez l'animal. Nous rions Michel et moi.
  • Il est con ce Lucien, mais il bosse pas mal. Pourquoi on irait pas rencontrer ce Berthot ?
Je voudrais lui répondre que j'en ai marre de tous ces vieux, mais il a déjà fait demi-tour.

10 commentaires:

DAN a dit…

Il est beaucoup question de vins dans cette histoire, et ça m’étonnerai que l’équipe d=ne parvienne pas à retrouver le ou les coupables, après tout ils n’ont qu’à se laisser guider par leur instinct non ?

phyll a dit…

par moments on croit avoir un fil conducteur et aller dans la bonne direction....... et bien non !! PAF ! un nouveau chapitre et tu nous replonge dans l'énigme...... quel talent !!! ;o)
et vive le pinard non de diou !!! :o)

Louis a dit…

Sans me vanter, je crois avoir les meilleurs lecteurs avec vous les Havrais. Je vous embrasse mes gones!!!

DAN a dit…

Tu as surtout deux commentateurs !
Alors lectrices lecteurs de Louis je fais appel à vous manifestez-vous en laissant une appréciation, allez, à vos plumes, ti Louis ne mors pas je vous rassure !

Louis a dit…

Oh Dan, cesse d'essayer de draguer sur mon blog en faisant des appels aux lectrices !!!

Aline a dit…

Je réponds à l'appel du large, non du Havre : c'est simple, avec Loulou on a toujours vingt ans !
Mais encore plus cette fois que les autres : on se fait ballader des troquets de la Croix -Rousse à ceux de la Mulatière, des vignes des Côtes du Rhone à celles de la Mitidja du bon temps des colonies, et même dans les maisons de retraite qu'on s'y voyait presque tellement ça faisait vécu ....

Loulou, on m'a dit que l'OL avait battu le PSG : c'est simple je n'y crois pas...
À la semaine prochaine, si vous le voulez bien !
La bise

Louis a dit…

Oui, depuis cette victoire, je ne suis plus le même. Je bois !
Enfin une femme sur cette page.
Tu viens pour l'Ibérique ? (un festival de cinéma à Villeurbanne pour ceux qui ne "sonssent" pas d'ici)
Amis Havrais, j'irais vous voir chez vous avec Aline si vous insistez !!!

DAN a dit…

Alors si tu viens avec Aline là y'a pas de souci vous êtes les bienvenus !

phyll a dit…

tu veux lui faire découvrir les deux vestiges Havrais ??!!..... :o)

Aline a dit…

Eh oui Loulou,
je viens pour l'Ibérique, je viens pour le Latino et même pour l'Américain. Dis-donc, ça ne communique pas beaucoup en interne dans l'agence de fins limiers croix-roussiens: pendant le cinéma, je squatte chez l'autre boss, le dénommé Michel.

Un p'tit tour au Havre au printemps ? Pourquoi pas ? Comme vestige havrais je ne connais que Malraux, enfin le musée qui a son son nom. J'avais bien aimé l'expo Nicolas de Staël il y a plus d'un an. Je ne suis pas contre en découvrir d'autres -je parle des vestiges.
À étudier pendant le festival du Zola ?