Le
bar est plein et ce pauvre Cracoss croit que c'est pour lui. Michel
me glisse que l'on aurait dû amener Lucien. Toutes les conversations
se sont tues et nous nous dirigeons vers le comptoir où j'ai reconnu
un Phyll éblouissant grâce à son légendaire chapeau. Il est
souriant, avant de réaliser que je suis accompagné par tous ces
zozos. Il faut bien avouer que nous avons une sale dégaine après ce
long voyage. Guitout tout débraillé agite sa cane en tout sens,
Cracoss distribue des programmes du Front de Gauche, tandis que Julot
plie sous le poids de ses trois cubis. « Tu comprends, m'a-t-il
confié pendant le voyage, quand je ne connais pas les goûts des
gens, je prends toujours du blanc, du rouge et du rosé. Faut être
prudent ! »
En
attendant il y a quelqu'un qui tord le nez en voyant ces cubis sur
son comptoir, c'est Justine la ravissante patronne du lieu. Je suis
sous le charme d'emblée, et n'écoute rien de ce que me dit Phyll.
Je ne suis pas le seul puisque j'entends ce faux cul de Michel
complimenter la patronne au sujet de la beauté de l'endroit. Je lui
glisse discrètement : « Même le snacking ? »
Il me repousse d'une bourrade et me voilà dans les bras de Guitou
qui demande avec gourmandise s'il y a déjà une bagarre. Les
présentations générales calment un peu tout le monde et Justine
pour bien nous montrer que nous ne sommes pas tombés chez des
sauvages, nous sort ses plus beaux verres pour nous servir un
Hermitage blanc à tomber sur le cul. J'entends Julot murmurer des
« merci mon Dieu » enfiévré tout en multipliant les
signes de croix. Il a posé ses cubis et déguste les yeux fermés,
complètement envoûté. Nous sommes d'ailleurs tous sous le coup de
l'émotion, et il faut que Phyll nous demande si nous avons fait bon
voyage, pour que la vie redémarre dans le bar. Nous échangeons pas
mal de banalité et de politesse avant d'aborder les choses
sérieuses. C'est L'aveugle amoureux qui s'y colle :
- Comment va Christelle ?
- Elle va bien, je vous rassure. Il sourit. Drôle de bonne femme, non ?
Guitou
se vexe tout de suite :
- Drôle ? Elle n'a rien de drôle. Elle est Lyonnaise, c'est tout.
- Qu'est-ce que tu veux dire, Phyll ?
Notre
hôte réfléchit quelques secondes :
- Ben, elle passe ses soirées au port, elle parle très peu, elle boit plus que vous et...Il marque un temps, ses bagages sont drôlement lourds.
- ???
- Elle a deux sacs, et croyez-moi, ils pèsent leurs poids. Quand je l'ai questionnée à ce sujet elle a prétendu qu'elle aimait lire, mais moi j'ai rarement entendu des livres « cliqueter »
Devant
notre désarroi, il baisse la voix pour être plus clair :
- Je suis persuadé qu'elle trimbale une véritable armurerie avec elle.
Devant
notre incrédulité il nous dit que nous jugerons par nous même
puisqu'il est temps de la rejoindre. « Dan nous a préparé un
bon repas. » Et en nous regardant tous, il ajoute : « On
s'arrêtera tout de même au camion pizzas...par prudence ! »
Quitter
Justine est un déchirement et je me promet de passer une grande
partie de mon séjour au Havre dans son bar. En attendant je grimpe
dans la voiture de Phyll pendant que les autres zouaves nous suivent.
- Vous n'êtes pas un peu trop nombreux ?
- On peux aller à l'hôtel, ne t'inquiète pas.
- Non, ce n'est pas ce que je voulais dire, mais pour une enquête, vous êtes un peu voyants. Enfin, il me semble.
Je
réfléchis avant de répondre en regardant défiler les rues du
Havre.
- Au contraire, qui pourrait imaginer qu'une telle bande de zozos puissent-être une redoutable équipe d'enquêteurs célèbre dans le monde entier.
Il
quitte la route des yeux pour me regarder :
- Tu n'en fait pas trop, là ?
Je
rigole en lui demandant si Justine est libre, et s'il connaît un bar
où l'on pourrait se battre tranquille , alors il a un sourire pour
m'expliquer que si je continue à tourner autour de Justine, il n'y
aura pas à aller trop loin pour se battre :
- Son mec est un jaloux...et un costaud. Ne cherche pas trop.
Je
vais changer de conversation quand il ajoute que Piotr, le fameux
type est Estonien. J'ai un hoquet : « Estonien, tu plaisantes
? »
- Pas du tout, il y a une grosse colonie Balte au Havre. C'est historique. Pourquoi cette surprise ?
Comme
nous arrivons, je me garde bien de répondre tout en appréciant
cette coïncidence. Je suis en plein dans l'Estonie en ce moment.
6 commentaires:
Bon ramenez-vous avec une, voire même plusieurs pizzas, car si vous comptez vous régaler c'est raté je ne sais même pas faire cuire un œuf, pourtant je l'ai entendu ce "conseil" au cours de ma vie "va te faire cuire un œuf", et bien depuis ce temps rien à faire, ça rate toujours, par contre j'ai du kaitechoppe là pas de problème...
Bon, quand on va chez "les gens" on amène toujours (outre les cubis et les verres INAO) des quenelles, un gateau de foie, un saucisson à cuire et une tarte à la praline. Faut ce qu'il faut !!!
Ok alors t'auras le droit au "trou Normand", ça je sais le faire...
pour moi, la pizza ira très bien !!.... et n'écoute pas ce que te dit DAN, il sait faire les pâtes !!!.....
sinon, qu'est ce que je joue bien, dis donc !!!... :o)
Bon, des pâtes ça ira. Là, je suis mal, je viens d'assassiner cette pauvre Justine. J'ai honte. Quelle m'envoie son mail pour que je m'excuse.
Comment s’appelle la nouvelle, déjà ?
Bon ok pour les pâtes, des Macaroni ça ira ?
Quand à la "nouvelle", elle s'appelle Cécile, espèce de tête en l'air !
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