mardi 30 novembre 2010

Episode 2


II.

En fait, Michel avait besoin de moi pour trimbaler du matériel « Au Zola », le « Zola » le préoccupait. « Le Zola » cette petite salle de cinéma d'art et d'essai de Villeurbanne, dont il présidait depuis des années une association de bénévoles. Ce cinéma depuis des mois, luttait avec acharnement pour sa survie. Pas facile. Michel nous avait obligés à adhérer à son association, et nous étions des fidèles de ce cinéma et de ses films rares venus du bout du monde. Je suis certain, que si en fin de nuit, un buveur nord-coréen avait franchi les portes de « Chez Roger », nous aurions sans problèmes pût entretenir une conversation soutenue avec lui. C'est vous dire à quel point nous étions des fidèles. Mais « Le Zola », comme beaucoup d'autres salles du même genre, ne survivait que grâce au soutien sans faille de la Mairie de Villeurbanne. Mairie, qui dans le cadre d'une grande rénovation, avait pour projet la modernisation totale du vieux cinéma : création de plusieurs salles, d'un hall spacieux et d'un bar accueillant. Passage au numérique et au trois D. Toutes choses plutôt coûteuses pour une municipalité. Et c'est là que le bât blessait. Pour bien contrôler cette ambitieuse rénovation, la mairie avait décidé d'étoffer l'équipe dirigeante du « Zola » en la dotant de trois nouveaux postes de direction : une DRH, un attaché culturel et un directeur de communication. Trois jeunes gens issus de grandes écoles de management. « Trois tocards » d'après Michel, qui comme les autres responsables, ne voyait pas d'un très bon œil ces nominations qu'il jugeait superflues. L'ambiance là-bas était devenue exécrable, et les tensions très vives entre les « historiques » et les nouveaux promus. Pour bien affirmer sa légitime domination, l'actuelle direction, constituée de Sandrine, Laurent et Michel, multipliait les « événements » afin de doter ce vieux cinéma d'une activité débordante, susceptible de rameuter de nouveaux clients. Et principalement de démontrer à la mairie l'inutilité crasse des nouveaux dirigeants. Michel nous avait déjà sollicité pour quelques animations de haut niveau comme par exemple tenir la buvette sans consommer plus que les clients, tout en évitant de les frapper à la première remarque malheureuse. Puis, Sandrine avait eu cette idée géniale : recréer des emplois d'ouvreuses. Oui, des ouvreuses avec leurs tenues colorées et leur panier chargé d'esquimaux glacés. Et cette initiative originale rencontra immédiatement un franc succès. Un succès aussi bien médiatique que populaire. Elles sont six aujourd'hui à assurer le travail tous les week-end, et l'affaire marche du feu de Dieu, au grand dam des jeunes gestionnaires qui avaient dénoncé ce projet à la mairie comme suicidaire. Comment Michel n'en avait pas tué un ou deux à l'époque, reste un mystère qui nous laisse toujours songeur. Mais il était devenu sinistre. Tout empêtré dans mes difficultés sentimentales avec Camille, je n'avais vraiment pas le temps, ni le cœur à supporter chaque soir ses humeurs massacrantes. Les SMS rageurs de ma petite Camille suffisaient largement à mon bonheur ! Nous allions à la grande déprime, voire à l'alcoolisme...

2 commentaires:

BBK.mel a dit…

Ah ces gamins ! Ils croient tout savoir et lorsqu'on presse leur nez, il en sort du lait !

phyll a dit…

ha.... les ouvreuses et leurs friandises...... c'était tout de même mieux que le bocal de pop-corns qui ne vous adresse même pas un p'tit sourire !!....