lundi 4 mai 2009

N° 21 Un gros chagrin

Le printemps naissant nous met dans le cœur des rêves et des espoirs. Lyon fait admirer tous ces atours rendant nos soirées plus belles et plus douces. Ainsi ce soir, collés au comptoir du « Bastos » nous devisons béatement pendant que Damien le patron veille à maintenir nos verres pleins. Les grandes portes sont ouvertes sur la jolie terrasse qui domine la ville, et elle est belle la ville ce soir avec toutes ses lumières. L’air doux qui souffle sur la cité, nous ramène des effluves de nature bourgeonnante mêlée à l’odeur des cigarettes qui pullulent en terrasse. La politique, le foot et le syndicat sont avec le cinéma et la littérature (oui, j’enjolive un brin ! ) les sujets qui roulent ce soir autour de la pompe à bière. Tout baigne, quand soudain, sans crier gare, Paulo éclate en sanglots. Il pleure sans bruit, assis sur son tabouret. De grosses larmes coulent sur ses joues mal rasées et ses épaules tressautent au rythme de ses sanglots silencieux. Surpris, je vais l’interroger quand Michel se penche vers moi pour me souffler élégamment à l’oreille : « Sa grosse s’est barrée ! » Je dévisage le pauvre Paulo, plein de compassion. Il était si heureux ces derniers temps. « Celle qu’il a connu au Cambodge en voyage organisé ? » Michel rigole, « Ouais, paraît qu’il avait le choix, il y avait plein de gonzesses dans son groupe, faut croire qu’il n’a pas eut la main heureuse ! » Lucien qui se mêle toujours de ce qui ne le regarde pas ajoute finement : « Il aurait mieux fait de ramener une Cambodgienne, paraît qu’elle sont bonnes » Michel lui décolle l’oreille d’un revers qui ferait pâlir d’envie le numéro un du tennis mondial. Pendant que ce niais part se faire soigner en cuisine en hurlant comme un porc que l’on égorge, nous nous penchons pour nous intéresser aux malheurs conjugaux de Paulo. Saine façon de passer le temps entre amis que d’écouter les déboires des autres en buvant des bières. Paulo dit en reniflant, qu’il ne comprend pas « tout allait si bien, on s’aimait. Elle est même venue avec moi au stade voir un match de rugby, c’est un signe non ? » Joël qui sait de quoi il parle, lui demande pourquoi, s’il était tant amoureux, passait-il ses soirées au bar. Paulo lui jette un regard noir : « Et toi, et vous ? Qu’est-ce que vous foutez là ? » Michel pour détendre l’atmosphère prend Paulo par le cou avant de lui répondre : « On vient pour être au bar avec toi et tous les potes » Lucien qui revient de l’arrière, un énorme pansement sanglant sur l’oreille se permet un « Des fois, y’en a qui ferait mieux de rester chez eux » Michel le regarde par en dessous, « c’est pour moi que tu dis cela ? » statistiquement, depuis la création de ce blog, Lucien ne prend qu’une baffe par soirée, mais le bougre qui connaît la fragilité des chiffres, reste prudemment à une distance de sécurité, et nous revenons à Paulo qui doucement sèche ses larmes. « Alors, pourquoi elle est partie ta femme ? » « Ben, j’en sais rien, une suite de détails insignifiants », « Pas si insignifiants que cela apparemment, puisqu’elle a mit les voiles, vas-y accouche, donne des exemples » Paulo se triture les méninges pour satisfaire notre curiosité : « Ben, elle gueulait souvent parce que je mangeais des biscottes dans le lit. » Comme on le fixe incrédule, il ajoute : « elle me reprochait surtout de tacher la cuvette des chiottes, tu vas pas me dire que c’est pas mesquin ? » Nous nous plongeons dans nos bières en même temps que dans nos pensées. Au bout d’une longue réflexion, Michel intervient péremptoire : « Merde, Paulo, c’est une bite que t’as, ou un arrosoir ? » Tout le monde rigole et Paulo devient boudeur. M’est avis que l’on va pouvoir se brosser pour qu’il nous paye une tournée. Il va se remettre à pleurer, et je vois que Michel est bien emmerdé, ne sachant comment réparer sa bonne blague, quand un quidam assis dans le fond du bar éclate de rire : « Un arrosoir, elle est bien bonne celle-là ! Je la replacerai. » Un mec pas prudent, et pas chanceux non plus puisque Michel bondit sur lui pour l’arracher à son siège. Il lui colle une paire de baffes sonores qui arrache un sourire à Paulo. Le type quitte le bar sous les quolibets et Michel revient vers nous pour torcher son verre. Paulo pleure encore, mais de joie apparemment puisqu’il déclare radieux en renouvelant la tournée : « C’est quelque chose l’amitié. »

5 commentaires:

Jef a dit…

Finalement, arrosoir ou pas ?

BBK.mel qui n'aime pas le foot. a dit…

Comme dans les Asterix, rien ne vaut une bonne bagarre avec les romains pour détendre l'atmosphère et se réconcilier autour d'un sanglier roti. Mais tout de même, c'est normal qu'elle soit partie, sa femme. L'emmener voir un match de rugby, à Lyon, c'est une bêtise.Il aurait mieux fait de l'emmener au foot.

Papa de Lili a dit…

Ouais! Rugby ou foot à Lyon actuellement c'est plutôt tristounet... Comme dit BBK:"...c'est normal qu'elle soit partie..."
Amitiés.

Adèle a dit…

" C'est quelque chose l'amitié". Tu nous le joue philosophe antique de comptoire ou quoi ? ;)

Dégeu tes histoires d'arrosoir !

Francis a dit…

>> BBK : C'est pas parce que le LOU a raté sa place en demi-finale qu'il ne faut pas le supporter lol