dimanche 20 janvier 2008

Frédérique

Hier soir, au théâtre, j’ai revu Frédérique. Vous allez me demander ce que je foutais au théâtre, et bien sachez que de temps en temps je quitte mon bar fétiche pour me cultiver un peu. Pour passer des nuits vissé au comptoir, il faut avoir en réserve de multiples sujets de conversation. Le foot pour Roger qui lui ne sort jamais de son bistrot, les femmes pour Michel, et le théâtre, le cinéma et les livres pour faire son intéressant lorsqu’une belle passe à proximité d’oreille.
Bref, j’étais tranquillement installé dans la salle entouré d’une flopée de représentantes de l’éducation nationale abonnées à Télérama lorsqu’elle est arrivée. Mon dieu, j’avais oublié comme elle était jolie. Une poupée. Elle m’a sourit avant de s’asseoir et la pièce a débuté. La pièce, quelle pièce ? Ne me demandez pas de quoi il en retourne, je n’ai rien capté de ce qui se déroulait sur scène. J’ai passé ma soirée à dévorer des yeux, la nuque et le délicat profil de Frédérique. Au gré des éclairages du spectacle, son visage allait ainsi de l’obscurité à la lumière. A l’observer ainsi, je reconnaissais bien son coté sérieux et appliqué. Elle a sur le visage, un voile de tristesse que je ne lui connaissait pas. Mais il y a si longtemps. Je ne l’ai pas quittée des yeux une seconde, espérant sottement qu’elle tournerait la tête vers moi. Quel imbécile ! Entre Frédérique et moi, il ne s’est réellement rien passé. Simplement une promesse d’amour. des regards et puis rien. Je crois que cette histoire était à sens unique. En tout cas je n’ai pas su créer les conditions favorables à une réelle histoire d’amour. Pour être clair, j’ai été minable. J’en ai toujours gardé une petite douleur cachée. Douleur qui se réveille chaque fois que nous nous rencontrons. A la sortie du théâtre, elle m’attend pour échanger quelques mots avec moi. Comme de vieux amis. Elle est naturelle alors que je suis noué et maladroit. Je lui propose d’aller boire un verre. (C’est d’un tonneau dont j’ai besoin) Elle accepte et son sourire revient, ses fossettes m’enivrent déjà. Je veux lui prendre le bras pour l’entraîner (et la garder pour toujours) lorsqu’elle me présente le gros tas de viande qui nous tournait autour depuis un moment, limite impolitesse, comme étant son mari. Je me prétends enchanté alors que j’échafaude déjà de par vers moi diverses formes d’assassinats raffinés. Une fois au bar je me sens mieux. Frédérique rigole de se retrouver là. « Tu viens toujours ici, alors ? » Je fais l’enfant penaud d’avoir été pris les doigts dans la confiture. Elle explique à son mari comment, lorsqu’elle était étudiante, elle a traîné ses guêtres dans ce bouge. Le gros machin n’a pas l’air plus enchanté que cela de ses révélations tardives, mais comme personne n’en a cure, nous attaquons les rafales. Frédérique papillonne, toujours à l’aise. Elle a embrassé Roger bien sur, puis Michel qui vient d’arriver, avant de s’attaquer à d’autres piliers du coin, tous enchantés de la revoir. Les tournées défilent, et je vois Frédérique s’animer et rajeunir à vue d’œil. Lorsque son mari se rend aux toilettes, Frédérique nous dit à quel point elle regrette l’époque du bar et nous la réconfortons gênés en lui expliquant que c’est sa jeunesse qu’elle regrette en réalité. Elle nous dit que non, mais se tait brusquement au retour de son homme. Elle boit beaucoup et elle a l’air heureuse d’un coup. Bêtement, cela me réchauffe le cœur. Un qui s’éteint par contre, c’est son mari, qui n’arrive plus à suivre. Les verres et les conversations vont trop vite pour lui. Et quand il veut rentrer, Frédérique refuse sèchement. Alors il la gifle violemment, sans un mot. Alors moi, je ne calcule pas, je sors mon couteau et je le crève simplement, sans un mot.
Le bonheur, parfois, demande quelques sacrifices.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Quel sacrifice. Il est grand,il est beau ce Martin !!

Eloïse a dit…

Ca c'est du Martin !!